Discrimination à l’embauche : Michel 1 – Mohammed 0

Sur le marché du travail, mieux vaut paraître catholique, que musulman ou juif : une étude de l’Institut Montaigne publiée jeudi 8 Octobre 2015 révèle de « fortes discriminations » à l’embauche liées à la religion, surtout envers les musulmans pratiquants.

Les musulmans, principale cible des discriminations

Marie-Anne Valfort, chercheuse, a envoyé dans le cadre d’une étude, des candidatures fictives à 6.231 offres d’emploi de comptables, assistants et secrétaires comptables en métropole. Elle a ensuite comparé le taux de convocation des candidat(e) s.

Trois éléments suggèrent leur appartenance religieuse : leur prénom, leur scolarité dans une école confessionnelle et leur engagement dans l’association de scoutisme de leur communauté.

Le résultat sans appel : les musulmans « sont beaucoup plus discriminés » par rapport aux catholiques en France « que ne le sont les Afro-Américains par rapport aux Blancs aux Etats-Unis », compare l’étude. Et selon son auteure, le testing, qui s’arrête avant l’entretien, sous-estime probablement les discriminations : toutes les études montrent que la discrimination est présente à chaque étape du recrutement.

Pourquoi une telle discrimination ?

Les Français associent de plus en plus facilement l’islam à l’extrémisme religieux et à l’oppression de la femme, poursuit-elle. Ces deux stéréotypes alimentent une discrimination très forte, en particulier à l’égard des hommes musulmans. Le recruteur les perçoit comme un risque accru de pratique religieuse transgressive sur le lieu de travail et les associe à un risque d’insubordination.

Pour étayer cette thèse, Mme Valfort a créé des profils « laïcs » mentionnant un engagement dans une association de scoutisme laïque. Elle a comparé leur taux de convocation avec celui des « pratiquants ».

L’impact est limité pour les candidat(e) s juifs, mais pas pour les hommes musulmans : en se montrant laïcs, ces derniers doublent leurs chances.

3 ans de prison et 45 000 euros d’amende

Les discriminations s’estompent-elles quand les candidats ont un profil d’excellence ? Pour répondre à cette question, la chercheuse a inclus des candidatures « d’exception », supérieures en termes de diplôme, de compétences et d’expérience.

Chez les femmes, l’étude met en évidence une disparition de la discrimination, non seulement à l’égard des candidates musulmanes mais aussi à l’égard des candidates juives.

Mais chez les hommes, au contraire, la discrimination à l’égard des candidats masculins juifs et musulmans s’intensifie. Les catholiques « d’exception » ont alors cinq fois plus de chances de décrocher un entretien que les musulmans « d’exception » et 1,5 fois plus que les juifs « d’exception ».

Le thème des discriminations au travail a récemment fait l’actualité, autour de la question du CV anonyme. Le gouvernement a refusé en mai de le généraliser, lui préférant des « actions de groupe » anti-discriminations. Le dispositif, s’il entre en vigueur, permettra aux victimes de saisir ensemble la justice, comme c’est déjà possible sur les questions de consommation. Un employeur coupable de discrimination risque jusqu’à trois ans de prison et 45.000 euros d’amende.